Wendell Steavenson
(source de l'image : www.thisislondon.co.uk)
Wendell Steavenson est journaliste freelance, ancienne correspondante au Time. Elle a écrit pour le New Yorker, Granta, Prospect et le Daily Telegraph.
Elle a écrit sur la Géorgie croulante de la fin des année nonante. Elle a écrit sur l'Irak, sur le Général Kamel Sachet héros de la guerre d'Iran et favori de Saddam Hussein. Son livre à ce sujet a d'ailleurs été adapté au cinéma :
"La Situation" de Philip Haas
Wendell Steavenson écrit aujourd'hui sur l'Egypte. Voici un extrait traduit :
Un de mes quartiers préférés au Caire est Boulaq. C'est un bidonville qui squatte un ancien quartier français de la ville, adjacent au centre-ville. On y pénetre, à quelques pas d'une autoroute klaxonnante surmontée d'un autopont, les ruelles sont cabossées et poussiéreuses, les enfants jouent à "chat" avec une boucle de plastique d'emballage, les vendeurs scandent le prix des pastèques, les imposantes façades tombent en miettes, le linge pend au dessus d'élégantes balustrades oubliées. Il y a un petit carrefour où peu de voitures passent car la route est étroite et inégale, plusieurs cafés y débordent, on peut y trouver des bonnes pitta de crevettes frites (le pain subventionné par le gouvernement) et une bouteille de Coca-Cola fraîche.
Alors m'assis à l'abri du Café des agriculteurs, nommé d'après un homme dont le nom était Farmer, et je regardai la poussière tourbillonner dans la brume de l'après-midi. Les femmes ne viennent pas s'asseoir pas dans ces cafés, ils sont réservés aux hommes qui viennent boire le thé et faire claquer les dominos et y passer l'après-midi. Mais je suis une étrangère et donc les règles ne s'appliquent heureusement pas tout à fait. Je leur ai demandé comment les vont les choses.
"Je ne sais pas. Dieu seul le sait", déclara un homme appelé Mahmoud, qui avait une truelle de plâtrier à côté de lui sur la table branlante.
"Les choses sont différentes après la révolution ?"
Mahmoud leva les yeux vers le ciel. "C'est entre les mains de Dieu."
Le quartier de Boulaq
(source de l'image : Valérian Mazataud, www.cyberpresse.ca)
Un autre homme, assez âgé, me dit-il, pour être un grand-père, chauve avec un cor de prière sur son front, déclara : "C'est la liberté maintenant."
"Qu'est-ce que ça change pour vous?" demandai-je.
"Rien !", dit Mahmoud le plâtrier, contemplant la scène face lui. Une femme en gallabya passa, une boîte en carton en équilibre sur sa tête. "Rien n'a changé, enfin, les policiers ne viennent plus." Il décrivit comment, avant la révolution, la police venait harceler les travailleurs assis dans la rue attendant d'être embauchés. L'agent les jetait dans un fourgon de police sans même vérifier leurs papiers d'identité. "Nous sommes légitimes. Nous sommes des gens pauvres ici, des travailleurs" expliqua Mahmoud, en agitant ses mains. Ensuite, poursuivit-il, les travailleurs étaient emmenés à la station de police et traînés dans un bureau, et le policier présentait une table couverte de lames de rasoir, de couteaux et de drogues et disait : "Choisissez votre délit." "Et vous ne pouviez rien faire ! Maintenant, après la révolution, ils ne reviendront plus ici."
(Cairo, The Word on the Street - 25 Mai 2010, la suite ici)
Chaque jour (ou presque), elle poste une nouvelle bribe de son périple, en anglais, ici.


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